Le Tchadanthropus Tribune

jeudi 17 novembre 2011

Les questions : Le site international arabe Elaph

Comment jugez-vous la chute du régime Kadhafi en tant qu’acteur politique africain?

Kadhafi était certes un homme politique très controversé. Ses 42 ans  au pouvoir, ses frasques et son autoritarisme sont des faits qu’objectivement, on ne peut ni nier et encore moins cautionner. Et pourtant, le scénario élaboré par les puissances Occidentales pour exécuter le Guide Libyen, pose de réelles questions de droit international, de souveraineté nationale, de la place des institutions africaines (UA) dans la gestion des évènements sur le continent et de l’instrumentalisation des institutions internationales (ONU). Ainsi, la résolution 1973 du Conseil de Sécurité votée au nom de la protection des civils, a non seulement été totalement fourvoyée mais semble avoir fait plus de dégât humain que Kadhafi en 42 ans de règne. La Libye est aujourd’hui en ruine et en proie à toutes les incertitudes. De quantité d’armes circulent sur tout le territoire national et dans la sous région. En tant qu’actrice politique africaine, je suis très inquiète de cette situation.

D’autre part, en tant que démocrate au-delà de toute considération, j’aurais voulu que Kadhafi soit présenté devant un Tribunal International Indépendant et qu’il réponde des actes qui lui sont reprochés et donne sa part de vérité. J’aurais souhaité que la justice qui est le cœur même de la Démocratie soit la vraie gagnante de cette guerre. Mais au lieu de ça, le monde a assisté à une exécution barbare et extra judiciaire du Guide libyen – les mêmes pratiques  que l’Occident reprochait à Kadhafi.  Nous ne saurions donc jamais la vérité que celle des vainqueurs. Comme le dit ce proverbe africain, «Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur».

Qu'est ce qu'il présentait réellement Kadhafi aux yeux des africains et surtout les populations des pays voisins?

Deux visions se confrontent. On a d’une part les africains qui le critiquent  pour sa gestion autoritaire et familiale du pouvoir et ceux qui voient en lui  un vrai panafricaniste qui a su  mettre à la disposition de son pays, de son peuple et même du continent, les richesses de la Libye

Quoiqu’il en soit, pour  beaucoup d’africains, particulièrement  la jeunesse, Kadhafi représentait  sur le plan politique, le père de l’Union Africaine et la renaissance de l’idée des Etats-Unis d’Afrique si chère aux pères fondateurs du panafricanisme que sont entre autres,  Kwame N’Nkrumah, Julius Nyerere, Nasser etc. Ils voyaient en lui, le défenseur des causes africaines comme la lutte contre l’Apartheid (la Libye de Kadhafi fût parmi les premiers pays visité par Mandela à sa sortie de 27 ans de prison), le rempart contre le néocolonialisme et le combat pour la libération de l’Afrique.

Est ce que cette chute peut-elle impacter d'une façon directe ou indirecte les régimes africains connus par leurs liaisons ambiguës avec l'ex-pouvoir libyen?

Pour ce qui concerne le Tchad, Idriss Deby est devenu son orphelin en quelque sorte malgré ses contorsions tardives à vouloir se rapprocher des nouveaux dirigeants libyens. Le dictateur tchadien privé de l’indéfectible soutien du Guide, craint de voir ses propres opposants  être soutenus par les nouveaux maîtres de la Libye qui lui reprocheraient d’avoir fourni à Kadhafi des centaines de mercenaires.

Enfin, il faut craindre que la prolifération des armes dans toute cette région avoisinante à la Libye, serve à alimenter des groupes terroristes tels qu’AQMI. La menace est prise très au  sérieux par les dirigeants de l’Algérie, du Niger et du Mali qui ont multiplié des rencontres afin d’en discuter.


Comment à votre avis ces régimes africains peuvent-ils compenser le manque de manne Libyenne pour exister encore?

Un pays comme le Tchad perçoit une manne pétrolière propre conséquente et ses dirigeants peuvent subvenir valablement aux besoins des populations pour peu que cette ressource soit consciencieusement utilisée. Malheureusement, force est de constater que les ressources du pays servent presque exclusivement à l’enrichissement illicite du  chef de l’Etat tchadien et de son clan ainsi qu’à l'achat de matériels de guerre au détriment d'une politique de paix pour le développement et de bien être social.

Le problème en fin de compte n’est pas le manque de revenu mais bien celui de  la mauvaise gouvernance. Le Tchad sous Idriss Deby en est l’exemple concret. Alors que ce pays est depuis 2003 producteur de pétrole et  ses revenues sont ostensiblement plus élevées, sa population est de plus en plus pauvre et le pays classé au dernier rang des pays les plus pauvre du monde. Quel paradoxe !

mardi 1 novembre 2011

CNCD: TCHAD: LE RÉGIME DOIT TOMBER.


COMMUNIQUÉ DU CNCD du 1/11/2011
TCHAD: LE RÉGIME DOIT TOMBER.
Tous les signaux de fin de règne sont perceptibles. L’État tchadien est en déliquescence avancée et le pouvoir « Itnotisant » de Déby est aux abois. Incapable de se remettre en cause, le régime est sans vision d’avenir ni projet de société crédible. Le président Déby est sourd et aveugle à tous les cris de détresse de la population, refusant toute conférence inclusive de paix et violant systématiquement tous les accords conclus. Le pouvoir de Ndjamena s’obstine dans ses manœuvres scélérates parachevant inexorablement son processus de pourrissement.

Peuple du Tchad, à toi de donner le coup de grâce afin d’ouvrir les vannes de la LIBERTÉ et des nouvelles perspectives heureuses pour ta patrie.

Le CNCD soutient les revendications légitimes des étudiants grévistes, les retraités, les fonctionnaires de tous les secteurs, les commerçants, les militaires, et la jeunesse...

Après vingt et un ans (21) d’un régime clanique sans partage, notre pays est plongé dans une crise d’une gravité sans précédent. Ce régime est illégitime, prédateur et criminel.

Sur le plan politique:
Dès la prise du pouvoir par Idriss Deby en décembre 1990, la politique menée est caractérisée par : une violence crapuleuse, institutionnalisation des crimes politiques. Il a d’abord procédé à écarter du pouvoir des compagnons de premières heures et puis progressivement à la liquidation systématique des opposants avec lesquels son régime a signé des accords de réconciliation. Le Pr Ibni Oumar Mahamat Saleh, Secrétaire générale du PLD, Porte Parole du CPCD (la principale coalition de Partis politiques de l’opposition, avec laquelle le régime a signé un accord dit « du 13 aout », parrainé par l’UE).

Depuis un certain temps, on observe au sein du clan une recrudescence des assassinats. Quand la fin est proche, les loups se mangent entre eux.

Sur le plan institutionnel:
Au fil des années, le pouvoir va se concentrer entre les seules mains d’Idriss Deby, de son clan et de son parti (MPS). S’arrogeant tous les leviers de commande de la vie politique, de l’administration, de la justice, des principaux médias des forces de défenses et de sécurités. Il se sert des institutions de la république selon son bon vouloir et dispose de l’État comme d’un bien privé, conduisant le pays dans l’impasse actuelle. En 2005, le président Déby a modifié la constitution en violation de ses engagements solennels et de l’esprit même de la constitution afin d’instituer une présidence à vie.

Les dernières élections présidentielles et législatives, à l’instar de toutes celles tenues depuis 1996 ont été entachées de fraudes massives et marquées par l’usage de la violence à des fins d’intimidation des adversaires politiques et de leurs militants. Boycottée par les principaux candidats de l’opposition, cette présidentielle marque une fois de plus le sacre d’un potentat honni par le peuple.

Sur le plan économique :
Le bilan est tout aussi effroyable. Le FMI dans son dernier rapport 2011, livre une analyse sans concession de l’état catastrophique de l’économie tchadienne caractérisée par une corruption endémique, une gestion opaque des finances publiques et de la trésorerie, l’octroi abusif de marchés de gré à gré au profit des proches, un manque notoire de transparence budgétaire, des insuffisances profondes dans les normes et cadres budgétaires légaux. Par exemple, la douane tchadienne une des principales sources de recettes pour l’économie tchadienne est contrôlée de manière totalement maffieuse par Mme HAIGA Déby, la sœur du président Idriss Deby. Il en est de même de toutes les entreprises étatiques. Le Tchad est littéralement dépecé par l’oligarchie au pouvoir et la population laissée pour compte.

Tous les objectifs annoncés avec l’ère pétrolière ont échoué, pire la situation est chaotique. Les différents rapports d’organisations internationales telles le PNUD, Transparency International, la Fondation Mo Ibrahim, la Banque Mondiale, etc. placent toujours le Tchad soit à la tête des pays les plus corrompus au monde ou au contraire, au dernier rang des pays les plus pauvres de la planète.

La situation sociale:
Elle est explosive. Tous les ingrédients d’un soulèvement populaire sont réunis. Depuis 2003, le Tchad est rentré dans le club des pays producteurs de pétrole avec un revenu annuel de plus de 750 millions d’euros, soit environ (500 milliards de FCFA), et pourtant, l’écrasante majorité des Tchadiens vit sans électricité et n’a pas accès à l’eau potable. Et bien heureuses les familles tchadiennes qui font les trois repas journaliers.

Les grèves se succèdent et touchent toutes les catégories sociales : Les étudiants réclamant des longs mois d’arriérés de bourses (35€/mensuel), les retraités leurs pensions, les fonctionnaires de tous les secteurs la revalorisation de leurs salaires, les commerçants le paiement de la dette intérieur, les militaires leurs droits, et les jeunes diplômés chômeurs.

Ndjamena est classée parmi les villes les plus chères au monde avec un SMIG théorique de 60.000 FCFA sensiblement égal à (90 euros). Les tracts, les tags « Déby Dégage » se multiplient sur l’ensemble du territoire national.

Face à cette colère populaire légitime, le gouvernement comme à son habitude répond par la menace et la répression. Les étudiants arrêtés sont toujours en détention. Le premier ministre Emmanuel Nadingar accuse les étudiants, les retraités civils et militaires, les fonctionnaires et les petits commerçants d'être téléguidés par des politiciens.

Sur le plan international:
L’ère Déby s’est illustrée par une série de décisions et de pratiques toutes aussi irresponsables les unes les autres qui ont contribué à définitivement décrédibiliser notre pays aux yeux de la communauté internationale. En 1999, l’Assemblée nationale tchadienne, une caisse de résonance du pouvoir, a adopté une modification de la loi sur le pétrole, qui régit la gestion des revenus pétroliers. Pour la Banque mondiale, cette loi constituait le fondement de la coopération entre les deux partenaires et surtout devait servir de modèle à travers le monde pour garantir la bonne gouvernance et la bonne gestion dans ce domaine.

On retiendra surtout, ces terribles images passées en boucle sur toutes les télévisions du monde de concitoyens envoyés à la potence comme mercenaire en Libye moyennant de l’argent, tout comme le régime Déby l’a fait quelques années auparavant en RCA, au Togo, et en RDC.

À titre d’exemple, de l’implication du président Déby dans la grande criminalité internationale : L’affaire des faux Dinars de Bahreïn, l’arrestation de son conseiller Djamal Aganaye en Allemagne avec une centaine de kilos de cocaïne.

LE CNCD APPELLE AU RASSEMBLEMENT DEMOCRATIQUE DE TOUTES LES FORCES VIVES.

Tchadiens, Tchadiennes,
 Chers (es) Compatriotes.
Face à cette situation socio- politique grave, le CNCD appelle les Tchadiennes et Tchadiens de toutes conditions sociales, de toutes tendances politiques et de toute confession, à prendre leurs responsabilités devant notre destin et l’histoire.

Nous devons unir nos forces et mettre un terme à ce régime qui depuis 21 ans foule aux pieds nos aspirations les plus légitimes et brise toutes les perspectives de développement malgré les énormes ressources dont regorge notre pays.
Nous exhortons tous les patriotes épris de paix et de justice, toutes les volontés intellectuelles, politiques et citoyennes préoccupées par l’intérêt supérieur de notre pays à adhérer avec nous à ce consensus politique.
Le CNCD est l’instrument de rassemblement de toutes les forces vives de la Nation pour la libération de notre peuple par un Changement radical et pacifique.

À travers cette plate-forme commune qui se propose d’être le creuset de toutes nos aspirations collectives, nous nous engageons résolument aux côtés de notre peuple dans sa lutte, pour sa pleine souveraineté et l’instauration d’un État de droit.

Le CNCD lance un appel solennel aux pays frères et amis d’aider le peuple tchadien dans sa lutte pour la démocratie.

Fait le 1er novembre 2011
la Coordinatrice du CNCD
Annette Yoram Laokolé